Habitations en bois / Cartigny (CH-GE)

Du BIMBY à Cartigny

1236 Cartigny, Suisse, de Mai 2017 à Mars 2021

Projet conçu par moi-même au sein de l'atelier d'architectes Grivel & Girod SA

Ce projet a été imaginé pour une famille héritant d'une ancienne grange agricole partiellement convertie en logement dans les années 1990. L'objectif est de créer deux habitations pour deux familles distinctes, l'une dans le bâtiment existant, l'autre dans une extension.

 

La question posée ici est donc, comme toute extension, celle de la greffe, mais envisagée ici dans toute ses dimensions. En effet, le bâtiment existant est une ancienne grange construite entre 1920 et 1945, qui est le témoignage d'une époque de construction en bois traditionnelle, voire vernaculaire. La conception prend ainsi une tournure d'autant plus intéressante qu'il s'agit pour le concepteur de porter un regard critique sur cette construction, pleine de bon sens et de simplicité, et de transposer cet enseignement dans une extension contemporaine, dont le choix du matériau principal de structure apparaît comme une évidence : le bois.

 

Au final, l'ambition du projet est de créer une extension du bâtiment existant écrite avec les mêmes codes et registres, mais dans un langage formel contemporain. 

 

L'objectif est de répondre à la question : qu'est-ce qu'une habitation contemporaine en bois, dans le contexte spécifique de Cartigny ? La réponse pourrait bien se trouver dans une recherche de néo-vernaculaire...

Questionner l'existant

Singulière, simple, brute, évidente, rustique, traditionnelle, forte, modeste. Frugale ?

 

Les principaux éléments constructifs identifiables issus d'une mise en oeuvre traditionnelle (identifiables dans d'autres constructions du village de Cartigny) sont les suivants :  expression d'un soubassement, structure filigrane bois, auvents de toiture avec expression des pannes en façade, revêtement de façade en bardage bois pour les parties supérieures au rez.

 

Ces éléments participent a conférer à l'actuelle grange son caractère singulier.

Une grange coupée en deux

L'ancienne grange étant divisée par d'un côté une zone agricole inconstructible et de l'autre une zone protégée, le choix de l'aménagement intérieur a été principalement dicté par cette contrainte. En effet, les limitations imposées en termes de nouvelles surfaces de plancher à l'intérieur du volume de l'ancienne grange ont conduit à "décaler" les nouveaux aménagements en zone protégée.

Chaque famille son jardin

L’intérêt principal de l’extension est la possibilité de conférer à chaque famille un un accès au jardin, de plein pied. L’effet de décalage permet ainsi à chacun de disposer d’une zone d’intimité. Si aujourd’hui le jardin est partagé, cette séparation implicite pourrait, dans l’avenir, devenir explicite et constituer deux propriétés bien distinctes.

Le soubassement comme socle du bâtiment

La présence d'un élément en béton de 50 cm de hauteur marquant le soubassement de l'ancienne grange est un élément singulier de l'édifice, il participe à son caractère. Le traitement de l'extension reprend cet élément identitaire pour d'une part lier les deux projets visuellement et d'autre part éloigner la nouvelle structure bois du sol. Le soubassement, intégralement en béton agit comme un socle au bâtiment. Cette particularité a été reprise pour le traitement de l'assise de la nouvelle construction.

Elévation Sud-Est

Elévation Nord-Ouest

Les éléments relevant des mêmes registres d'expression repris pour l'extension et visibles en élévation sont notamment l'expression des auvents et des pannes, tout comme l'utilisation d'un bardage en bois.

Structure : exaltation du filigrane

Les interventions sur chacun des bâtiments sont en grande partie composées de structures filigranes en bois, dont l'ensemble reflète une certaine complexité constructive.

Aussi, la contrainte de disposition de la majorité des espaces au dessus du R+1 en zone protégée a conduit à la création d'une double hauteur sur les espaces servis (salle à manger, entrée, séjour). Ceci est plutôt bienvenu puisque cela permet de donner de la respiration et de profiter du volume important qu'offre le bâtiment. La transformation vise ainsi à conserver et maximiser le côté traversant du plan, du Sud/Est au Nord/Ouest. Cet effet est d'autant plus percutant que les dimensions des baies vitrées permettent de créer un effet de cadrage des deux côtés du jardin.

Habitation dans l'extension :  entre proximité et éloignement

 

La composition du plan de l'extension (qui n'en est pas vraiment une du fait de son absence de relation spatiale avec l'ancienne grange) a été dictée par :

 

- la volonté de s'éloigner au maximum de l'habitation de la grange (protection contre les vis-à-vis et les nuisances sonores éventuelles)

 

- la volonté de créer un espace "principal" traversant (pour maximiser la relation directe au jardin et la grande profondeur de la parcelle côté Nord-Est)

 

- la volonté de capter la lumière du matin, du midi et du soir (intérêt thermique, création d'ambiances spécifiques suivant l'heure de la journée).

 

Ces volontés sont prolongées à l'échelle du détail avec l'emploi d'un système spécifique d'occultation des baies vitrées, sous forme de volets battants. L'intérêt est de pouvoir non seulement gérer la quantité de lumière pénétrant à l'intérieur de l'habitation, mais aussi sa qualité, en offrant la possibilité d'orienter plus ou moins les volets et en choisissant un traitement de bois spécifique. 

La structure de l'extension est le reflet d'une démarche conciliant les bienfaits d'une construction mixte béton / bois. Sous un autre angle, il s'agit là encore pour ce projet de confronter construction massive et construction filigrane. 

 

C'est ainsi que le béton est utilisé avec parcimonie, là où il est le plus performant : pour le sous-sol, le soubassement (éloignement des structures bois de l'humidité) et une petite partie du rez-de-chaussée (pour le contreventement de la partie en bois). La structure en bois quand à elle se compose d'éléments longilignes, des poteaux et des poutres, avec un complément en registre de plaques pour les murs périphériques.

 

Tout comme l'ancienne grange à laquelle elle est accolée, l'expression conférée à l'extension vise à révéler au maximum sa structure primaire. A l'intérieur comme à l'extérieur cette dernière est parfaitement visible. Cet effet permet de caractériser l'espace, en favorisant la vérité constructive. 

 

On le voit, l'extension est travaillée comme étant la transcription du bâtiment existant, mais dans une écriture contemporaine.

Plans des niveaux

Images intérieures : grange

Images intérieures : construction neuve

Images extérieures de nuit

Analyser - Questionner - Synthétiser - Spatialiser - Construire

© 2010 - 2020 Antoine Sonnery-Cottet  /  architecte diplômé d'Etat, HMONP